« Le sport et la citoyenneté seront
deux des valeurs de redémarrage »

 

Entrepreneur dans le secteur médico-social et touristique et acteur impliqué dans le monde du sport, le fondateur du groupe Aplus et président du club de football CS Sedan Ardennes Marc Dubois est particulièrement concerné par la crise sanitaire liée au Covid-19. Il redoute ses conséquences à moyen terme, tout en étant optimiste pour le monde du sport.

 

 

Vous êtes à la fois un entrepreneur (président du groupe Aplus spécialisé dans la construction et l’exploitation d’EHPAD et d’établissements de bien-être associant hôtellerie et spa) et un acteur reconnu du sport, président du CS Sedan Ardennes. Comment vos activités sont-elles impactées par la situation sanitaire ?

MD : Les activités liées aux EPHAD ont été les premières touchées. Il nous a fallu prendre des décisions rapides, beaucoup de précautions et mobiliser nos équipes dans une période où la sécurité du personnel soignant n’était pas assurée. Nous manquions notamment de masques et de gels, mais nos établissements ont subi aucune contamination. Le personnel a été héroïque. Aujourd’hui, la situation est sous contrôle.

Nos activités liées au tourisme et au sport sont très impactées évidemment, et nous avons peu de perspectives de reprise. Les activités de tourisme (hôtellerie, restauration) sont interdites jusqu’au 2 juin, au minimum. C’est le cas également des activités physiques et sportives par groupe dans un espace fermé ainsi que des espaces aquatiques. Nos activités sont donc à l’arrêt.

Enfin, au niveau du football, les championnats ont été interrompus. Notre club évolue au niveau amateur, en National 2 (4e division). Nous subissons là aussi la situation. Bien que notre club ne soit pas concerné par l’interdiction jusqu’en septembre des événements réunissant plus de 5000 personnes, il est bien difficile aujourd’hui d’imaginer un calendrier de reprise.

 

Au niveau sportif, votre club est l’un des « perdants » de l’arrêt prématuré des compétitions, puisque le CSSA était encore en course pour la montée en National 1 (le SC Bastia a finalement devancé le club ardennais). Comment accueillez-vous cette décision ?

MD : C’est évidemment une immense frustration. Nous étions en tête jusqu’à la 19e journée et, en l’espace d’une semaine, notre destin a basculé. Je ne conteste bien évidemment pas la clôture des championnats. D’un point de vue sanitaire, il était impossible de continuer. Mais nous ressentons un sentiment d’injustice quant à la méthode de calcul choisie pour arrêter le classement. C’est comme si on avait arrêté le match à la 60e minute.

Nous avons donc formulé un recours devant le CNOSF pour contester cette mesure, qui nous semble injuste et inéquitable. Ce recours sera examiné le 19 mai. Il s’agit d’une procédure de conciliation, et en fonction de l’avis formulé, nous déciderons de poursuivre ou non notre combat devant les juridictions administratives.

 

Plus globalement, des inquiétudes ont été exprimées quant à la pérennité financière des clubs sportifs, qu’ils soient professionnels ou non. Quel est votre sentiment à ce propos, vous qui siégez aussi au sein du conseil national de l’U2C2F (l’Union des Clubs des Championnats Français de Football) ?

MD : L’inquiétude est prégnante à tous les niveaux. La plupart des clubs amateurs vivent de soutiens externes (collectivités locales, PME…). C’est moins le cas à Sedan, donc nous sommes un peu plus sereins. Mais ces ressources représentent parfois 80% du budget des clubs. Les conséquences économiques de la crise sanitaire vont être assez violentes, à tous les niveaux. Demain, les budgets ne seront pas les mêmes. Une autre incertitude tient à la réaction du public. Reviendra-t-il dans les stades ? Les parents laisseront-ils leurs enfants reprendre une licence sportive dans les conditions actuelles ? La pire des choses serait que l’on ait une contamination dans un club de haut niveau en phase de reprise. Les conséquences seraient désastreuses. C’est pourquoi il faut faire preuve de prudence.

 

Notre Think tank propose une réflexion sur l’avenir de nos modèles sportifs au vu de la crise actuelle. Comment voyez-vous les mois à venir ?

MD : Au niveau de l’U2C2F, nous avons exprimé notre soutien aux pouvoirs publics dans la phase de déconfinement progressif. Nous sommes prêts à ce que nos clubs jouent un rôle au niveau des activités périscolaires.

Globalement, je suis convaincu que les clubs sportifs, professionnels ou non, doivent avoir un rôle sociétal fort. Qu’ils doivent agir auprès de leur communauté, donner du sens à leurs actions au niveau local. Beaucoup de clubs le font déjà, mais je pense que la situation actuelle va renforcer cela dans les mois et les années à venir.

A Sedan, nous avons un projet circulaire autour du club : le projet MySens. Il s’agit d’un complexe hôtelier, mêlant prévention santé, bien-être, sport et nouvelles technologies. Aujourd’hui, nous sommes plus que jamais convaincus de la pertinence de notre approche. La crise sanitaire a malheureusement renforcé l’utilité d’un tel projet, notamment sur la collecte et le traitement des données de santé. Je pense que le sport et la citoyenneté seront deux des valeurs de redémarrage dans les semaines à venir. C’est pourquoi je reste confiant sur ce type d’approches.





Sport et citoyenneté