« Je n’ai jamais trouvé une discipline qui m’apporte autant que le parachutisme en termes de sensations, d’adrénaline et de recul »

Propos recueillis par Pauline Gratton, Chargée de mission du Think tank Sport et Citoyenneté

 

Hayette Djennane est double championne de France (2015, 2016) de Voltige Tandem Handisport. Cette compétitrice de 25 ans est atteinte d’une myopathie de ceinture qui paralyse peu à peu ses membres inférieurs et supérieurs. Elle est membre de H@ndi-@ltitude association visant à développer l’accès aux sports de plein air pour les personnes en situation de handicap.

©Photos : Fédération Française de Parachutisme 

Comment avez-vous découvert le parachutisme et quelles furent vos premières impressions sur ce sport extrême ?

HD : Cela fait 19 ans que je fais du sport, 12 ans en milieu valide et 7 ans en handisport. J’ai dû basculer dans le milieu handisport suite à une maladie évolutive. J’ai une myopathie, je perds ma force musculaire au fur et à mesure des années. Durant ces 12 années en milieu valide, j’étais en compétition à haut niveau en natation, en gym acrobatique, en cirque et en Kung fu. Quand j’ai dû rejoindre le milieu handisport, j’ai essayé différents sports, dont le parachutisme. L’école où j’étais scolarisée était mixte (handi/valide) et proposait des week-ends « découverte ». Nos professeurs de sport étant des parachutistes aguerris, c’est tout naturellement que je me suis laissée tenter ! Mon premier saut était une catastrophe… C’était très impressionnant !

En quoi consiste la Voltige Tandem Handisport, une discipline dans laquelle vous êtes double championne de France ?

HD : La Fédération Française de Parachutisme (FFP) a lancé la première compétition de Voltige Tandem Handisport en 2013. C’est très spectaculaire ! On monte à 4000 mètres d’altitude, on est relié à un moniteur tandem et un caméraman saute en même temps que nous. Pendant le saut, le caméraman se positionne en face du binôme et ne bouge plus. Le moniteur tandem se met en position neutre et c’est alors au compétiteur de réaliser quatre tours le plus rapidement et le plus proprement possible : un premier tour à 360° à droite, puis à gauche, un autre à droite et un dernier à gauche. L’objectif est d’arriver à chaque clôture de tour en face du caméraman. C’est très physique, et lorsqu’on n’est pas en pleine possession de ses capacités physiques, il faut compenser mentalement. C’est là que cela devient intéressant ! Il faut aussi prendre soin de soi, être à l’écoute de son corps et de ses sensations, c’est une adaptation constante.

Le parachutisme est une discipline atypique dans le monde handisport. En quoi est-ce différent de pratiquer un sport extrême ?

HD : La notion de sécurité et la dimension psychologique sont très importantes. Je fais du sport depuis 19 ans et je n’ai jamais trouvé une discipline qui m’apporte autant que le parachutisme en termes de sensations, d’adrénaline et de recul. Quand j’étais en milieu valide, je faisais entre 12 et 14 heures de sport par semaine et grâce au parachutisme, j’arrive à ressentir les mêmes effets bénéfiques, la même adrénaline qu’auparavant. C’est ce qui m’a donné envie d’aller au bout de cette pratique.

Quelles sont vos échéances sportives à venir ?

HD : Aujourd’hui [mercredi 9 août] commencent les championnats de France toute discipline à Vichy. La catégorie Handisport a été intégrée à ces championnats pour la première fois en 2014. Ce sera donc la 4e édition où les sportifs valides/handi se côtoient. Je vais également participer à une compétition internationale. La France est précurseur à ce niveau puisque la FFP a lancé l’an dernier le premier Challenge Européen. Je participerai à la 2e édition qui aura lieu du 13 au 17 septembre 2017 à Minsk en Biélorussie.

Parlez-nous de l’association H@ndi-@ltitude dont vous faites partie, des projets que vous menez et du message que vous voulez faire passer à travers cet engagement.

HD : H@ndi-@ltitude est une association qui permet à des personnes en situation de handicap d’accéder à des sports de plein air. Je suis personnellement en charge du volet parachutisme. L’association est présidée par Marie-Agnès Dizien. C’est mon caméraman, elle fait partie de mon équipe de saut en parachute. On mène des projets avec l’objectif de réaliser les rêves de chacun et d’encourager le dépassement de soi. Nous voulons qu’à travers la découverte de ce type de sports, les personnes en situation de handicap aient confiance en elles et puissent s’inscrire pleinement dans la société. L’idée est de faire de ces sports un vecteur d’inclusion et d’insertion.

Vous menez actuellement une collecte de fonds dans le cadre d’H@ndi-@ltitude. A quoi est-elle destinée ?

HD : Nous avons lancé une collecte de dons grâce à la plateforme Sponsorise.me et le soutien de l’entreprise Eden Park. Elle doit permettre de financer notre participation aux prochaines compétitions nationales et internationales. Grâce à ces fonds, les membres d’H@ndi-@ltitude pourront porter les couleurs de la France et tenter de décrocher un podium. On veut montrer que la France est également la meilleure nation de parachutisme dans la catégorie Handisport.

Quelle est votre regard sur le développement de la pratique sportive des personnes en situation de handicap en France ?

HD : Beaucoup d’actions sont menées actuellement, cela évolue dans le bon sens. Il ne faut toutefois pas oublier que le combat n’est jamais gagné. L’objectif, c’est de développer au maximum la pratique handi. Quand on fait du sport, on est des athlètes avant tout, des compétiteurs qui sont là pour se donner à fond dans leur pratique. C’est là toute la richesse du sport, de se retrouver finalement au même niveau que tout le monde. En termes d’inclusion et d’intégration il n’y a pas, à mon échelle, de vecteur plus important que le sport.

 





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