Pour la création d’unités d’intégrité

 

La crise sanitaire aura de multiples impacts sur le sport. Chez Sport et Citoyenneté, nous pensons qu’elle peut être salutaire, si elle permet d’accélérer un certain nombre d’évolutions. Par le biais de tribunes d’experts, nous souhaitons recommander, aux pouvoirs publics, des mesures opérationnelles destinées à lancer le sport de l’après-crise. Nous en avions déjà recensé un certain nombre dans ce livret de propositions pour la loi Sport et Société il y a quelques mois. Aujourd’hui, alors que la politique européenne du sport ne cesse de se développer, nous renforçons cet engagement en Europe et localement.

 

 

Tribune de Marc Peltier, Maître de conférences en droit (Université Côte d’Azur), Avocat au barreau de Paris, Membre du Bureau de l’Unité d’intégrité de l’athlétisme et de l’Unité d’intégrité de la Fédération Internationale de Hockey, Membre du Comité Scientifique du Think tank Sport et Citoyenneté

 

 

« A quelque chose malheur est bon » : toute crise doit nous conduire à réfléchir aux moyens de nous améliorer. Déjà, des voix se font entendre en vue d’un renforcement de l’éthique. « Le monde d’après » devra en tenir compte.

Le législateur français est déjà intervenu afin de renforcer l’éthique du sport. Dans un livret de propositions publié en 2018, Sport et citoyenneté avait constaté l’insuffisance de ces mesures et proposé l’instauration d’un « contrôle indépendant obligatoire de l’éthique et de la bonne gouvernance des organisations sportives, à travers la mise en place d’une autorité administrative indépendante (AAI) ».

Le symptôme des conflits d’intérêts potentiels au sein du monde sportif est observable au-delà des frontières du sport français. Le remède, l’externalisation du contrôle de l’éthique, est aujourd’hui peu pratiqué dans le sport français.

La création d’une AAI peut être la solution. Elle est déjà administrée avec succès dans le domaine des paris sportifs ou dans celui de la lutte contre le dopage, sous la forme voisine d’une autorité publique indépendante.

D’autres pistes peuvent cependant être étudiées, par exemple celles qui mènent aux unités d’intégrité qu’ont créées certaines fédérations internationales (notamment les fédérations internationales équestre, d’athlétisme, de badminton, de biathlon, de hockey, de tennis…).

Leur domaine de compétence est varié et peut inclure les luttes contre le dopage, la corruption, la manipulation des rencontres ou de l’âge des participants, les harcèlements etc. Elles mènent en particulier des programmes d’éducation, d’enquête pouvant aller jusqu’à un pouvoir de sanction.

Structurellement, ces unités d’intégrité ne sont, à ce jour, pas des personnes morales distinctes des fédérations internationales qui les ont créées. Elles font partie des fédérations et sont, en grande partie, financées par elles.

Cela ne remet pas pour autant en cause leur indépendance. Il revient à la fédération de garantir cette indépendance dans le cadre des textes constitutifs de l’unité d’intégrité. Celle-ci doit pouvoir opérer sans intervention des organes dirigeants de la fédération.

Le modèle de l’unité d’intégrité peut être repris par les fédérations nationales. La réforme annoncée du sport français et de sa gouvernance pourrait y inciter.

Les obstacles sont peu nombreux. Dans le cadre de la lutte contre le dopage ou de la régulation des paris, ces unités pourraient coopérer avec les autorités en place en partageant leur connaissance spécifique du sport afin d’affiner les enquêtes et les programmes d’éducation.

Alors que la Nation est invitée à sortir des sentiers battus et à se réinventer, la création en France d’unités d’intégrité sportive est une piste à ne pas négliger.

 

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