Sport & Fierté: les mots de Géraldine Pons

Sport et Citoyenneté a réalisé avec la Fondation FIER (Fondation Inclusion pour un Environnement Respectueux-Sport et Culture) un livre Sport & Fierté sur l’inclusion des personnes LGBTQI + dans le sport. 20 personnalités du monde sportif venant d’horizon divers y témoignent en tant que personnes concernées ou comme alliées et ouvrent la voie à une véritable prise de conscience collective sur cet enjeu. Regards de Géraldine Pons, directrice des sports, EUROSPORT FRANCE


« C’est vrai que la danse c’est que pour les filles ? »

Achille n’a que 6 ans lorsqu’il me pose la question. On lui a fait la réflexion à l’école, un élève de CP, aussi jeune que lui, et qui répète sans doute ce qu’il a entendu. Mais mon fils s’interroge, pour­quoi s’est-on moqué de lui, n’a-t-il pas le droit de faire de la danse classique juste parce qu’il est un garçon ? Je lui explique ce que sous-entend cette remarque stupide et rétrograde : il a 6 ans, il aime danser, point.

Achille a 9 ans désormais, il fait toujours de la danse classique par plaisir mais me précise qu’il arrêtera probablement quand il ira au collège. Étrange décision pour un petit garçon qui se rêve danseur étoile. Je creuse le sujet et tombe sur le nœud, non pas de son problème mais de celui des autres…

« Les garçons qui font de la danse classique, ils sont homosexuels ? c’est ce que disent les co­pains, que c’est un sport de humhum… ». Compre­nez un sport de PD, de tafioles…

Combien de fois ai-je entendu cette phrase ? Je travaille dans le sport depuis plus de 20 ans, j’ai commenté du patinage artistique, autant dire que je ne compte plus. Dès qu’un homme pratique un sport dit artistique, il est homo ou au moins « une partie de lui non, (laquelle je n’en sais rien, je n’ai jamais compris le sens de cette précision…) parce que c’est quand même bizarre de porter des col­lants moulant à paillettes ? ».

Les filles ne sont pas épargnées, si elle font du rug­by, c’est qu’elles sont forcément lesbiennes, sinon « pourquoi voudraient-elle faire un sport de mecs où on se rentre dedans » ? Bien sûr, quelle idée !

L’homophobie dans le sport n’est pas un sujet nouveau, au même titre que le sexisme ou le racisme, mais l’omerta régnant dans le milieu a contribué à rendre la question plus taboue. Les athlètes eux-mêmes sont en partie responsables de cette situation. Pas simple en pleine carrière disent-ils, d’affronter la pression et l’hypocrisie des sponsors, médias, fédérations et autres sup­porters. Pas simple pour le business…

Comme toujours il a fallu du courage et des ac­tions pour changer les mentalités et casser les stéréotypes. Pendant longtemps, j’avoue ne pas avoir réagi à ces réflexions, j’en ai même souri parfois dans l’ambiance. Aujourd’hui, je ne tolère plus ces remarques et fais en sorte de donner la parole à ceux qui souhaitent briser le silence et de ne pas questionner ceux qui n’en font pas cas. Je salue surtout cette initiative et la liberté de parole de ceux qui s’expriment dans cet ouvrage.

Parce que l’orientation sexuelle ne peut être cor­rélée à la performance ou l’émotion que suscite les sportifs, parce que les choix personnels d’un athlète ne devrait pas être un enjeu de marketing, parce que les stéréotypes ne peuvent plus briser les rêves de chacun et parce qu’on doit respecter la vie privée, à mon niveau et avec mes moyens, je lutte et continuerai à lutter contre ces discrimi­nations.

Et je souhaite sincèrement à mon petit garçon de devenir danseur si tel est son souhait. J’en serai très F.I.E.R, autant que je le serai de ses choix et de ses orientations quels qu’ils soient.

 

Le livre Sport & Fierté est disponible en adhérent à notre think tank. Plus d’informations ici

 





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