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« L’intégration des principes de responsabilité sociale dans les organisations sportives »

 

3 avril 2012

Francois_Aurélien

 

Aurélien François

Doctorant à la faculté des Sciences du Sport de l’Université de Bourgogne et membre du laboratoire Socio-Psychologie et Management du Sport (SPMS EA 4180)

 

Réflexion proposée par Sport et Citoyenneté dans le cadre de la semaine du développement durable.

Emprunté au secteur des entreprises, le concept de responsabilité sociale de l’entreprise (RSE) est en train de se transposer au monde du sport. La RSE porte en elle l’idée que l’entreprise n’est plus seulement garante de la maximisation du profit de ses actionnaires, comme le soutenait le célèbre prix Nobel d’économie Milton Friedman dans les années 1970, mais qu’elle doit être source de bénéfices pour l’ensemble de la société. Ancrée dans la mouvance générale du développement durable (terme souvent privilégié en Europe), la RSE devient un enjeu majeur pour les dirigeants d’organisations sportives.

En effet, bien que les principes fondamentaux du développement durable soient inscrits dans le code génétique du sport, les organisations sportives ont, paradoxalement, des difficultés à intégrer cette nouvelle approche dans leurs projets, leurs process de management et leurs pratiques d´évaluation de leurs performances. Le sport est pourtant devenu un secteur d’activité essentiel à la vie de nos territoires répondant à des problématiques de société telles que l’éducation, l’intégration, la santé, le développement économique et l’emploi local…

« L’essor des pratiques de RSE au sein des organisations sportives »

Récemment, une série d’initiatives se sont multipliées en faveur de l’intégration de la RSE aux logiques de fonctionnement des organisations sportives. Ces mesures sont portées, aujourd’hui, au plus haut niveau de l’Etat par le ministère des Sports qui, depuis 2011, a entrepris de décliner la norme ISO 26000 à l’ensemble du mouvement sportif. Cette norme, garante de l’intégration des principes du développement durable dans le pilotage des organisations, indique que la responsabilité sociétale se traduit par la volonté des organisations d’assumer leurs responsabilités des impacts de leurs décisions et de leurs activités sur la société et l’environnement et d’en rendre compte (Agence française de normalisation). La transposition de l’ISO 26000 au secteur du sport doit permettre à une multitude d’organisations sportives (fédérations, clubs sportifs professionnels, grands événements sportifs) de manager leurs politiques de responsabilité sociale. En matière d’initiatives sociales, notons que les grandes institutions mondiales et européennes se dotent de programmes de RSE spécifiques au traitement de problèmes sociétaux mondiaux. A titre d’exemple, la FIFA a ratifié un document intitulé « Football for Hope » lui recommandant de dédier à minima 0,7% de ses revenus à sa politique de RSE. En France, certaines fédérations s’appuient sur l’Agenda 21 (document contenant 21 objectifs en faveur du développement durable) afin de mettre en place des actions managériales concrètes adaptées aux spécificités des activités pratiquées. Les sports de pleine nature apparaissent en avance sur la question environnementale comme en témoigne la transposition, de la part de la fédération française de triathlon, de l’Agenda 21 décliné en divers engagements en faveur d’un triathlon durable. Les clubs sportifs professionnels et les organisateurs d’événements sportifs ont également des enjeux considérables à la mise en avant de leurs responsabilités sociales. Ainsi, face à la fracture qui s’installe entre sport de masse et sport business, les clubs professionnels tentent de dépasser le seul cadre des missions d’intérêt général qui les obligent à justifier des subventions publiques perçues. La période actuelle est propice, pour ce type d’organisations, au mouvement de création de structures dédiées au mécénat (fondation, fonds de dotation, association citoyenne…) lesquelles permettent de mettre en lumière des associations caritatives. Les organisateurs d’événements sportifs ont, quant à eux, des enjeux économiques forts à intégrer les principes de RSE dans leurs façons de piloter leurs manifestations. L’application de bilan carbone sur les plus grands événements sportifs rend compte des efforts environnementaux à réaliser notamment en termes de déplacements qui constituent le poste le plus dispendieux en matière énergétique. Ce type d’outils invite ainsi à la réflexion autour de la mise en place de mesures alternatives moins énergivores et aussi plus économiques.

« Aller au-delà des actions symboliques »

Longtemps considérée comme allant de soi, la responsabilité sociale des organisations sportives est pendant longtemps restée à l’état embryonnaire ; les managers se désintéressant de la question de l’impact de leurs activités sur l’environnement. Cela est en partie dû au fait que le sport, empreint de valeurs sociales fortes, a souvent été utilisé comme alibi mobilisé par les dirigeants afin d’excuser l’absence de mise en place d’actions de responsabilité sociale. La multiplicité des initiatives relevées participent à l’émergence d’un secteur en plein essor du point de vue de la RSE. Toutefois, certaines de ces actions sont engagées de façon symbolique dans un souci de conformisme afin de faire paraître les organisations sportives légitimes aux yeux de leurs nombreuses parties prenantes. Nous souhaitons, à travers cette contribution, attirer l’attention sur la nécessité pour les managers d’organisations sportives de dépasser la seule volonté de légitimation de leurs activités et de rendre leurs stratégies de responsabilités sociales transversales aux différentes fonctions de leurs structures. Certaines pratiques de RSE constituent des leviers d’actions formidables permettant d’orienter la stratégie de développement des organisations vers un management plus responsable. Le sport, à travers l’éthique qu’il véhicule, doit devenir un secteur leader en matière de pratiques sociétales. La balle est, à présent, dans le camp des dirigeants d’organisations sportives libres de conduire des actions sociétales innovantes participant à l’élaboration de nouveaux modèles de management plus durables.

Note : les multiples pratiques de RSE auxquelles souscrivent les différentes organisations sportives ont été décrites dans un ouvrage intitulé « Sport et RSE : vers un management responsable ? »(1). Celui-ci présente les enjeux et les bonnes pratiques en matière de responsabilité sociale dans le secteur du sport. Il est susceptible d’intéresser les étudiants et chercheurs en management et en management du sport mais aussi les cadres et dirigeants du secteur du sport, les fédérations, les clubs sportifs professionnels, les organisateurs de grands événements sportifs…

 





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