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« Inspirer, dynamiser et accélérer l’action collective en faveur du respect des droits humains et de l’environnement  »

 

« L’Union fait la force » est le titre de la nouvelle stratégie de durabilité adoptée par l’UEFA. Au travers de 11 domaines et politiques d’action, l’association européenne du football entend participer au changement et entraîner avec elle les parties prenantes du football européen. Michele Uva, le directeur « Football et responsabilité sociale » nous présente cette feuille de route ambitieuse.

 

Pourquoi l’UEFA a-t-elle choisi d’adopter une stratégie de durabilité à horizon 2030 ?
MU: Il ne fait aucun doute que la sensibilisation et les appels à l’action en matière de durabilité progressent dans toute la société, y compris dans le football – au sein des associations membres, des groupes de supporters, des clubs et des ligues. L’UEFA et le football européen faisant partie intégrante de la société, ils sont appelés à contribuer à la solution. Et nous le pouvons, car le football a l’extraordinaire capacité de mobiliser un très large public, au sein de l’une des plus grandes communautés d’Europe.

Au cours de la saison 2020-2021, la durabilité est devenue une priorité pour l’UEFA. Sous la direction du Comité exécutif de l’UEFA et de sa Commission « Fair-play et Responsabilité sociale », nous avons fait de la « responsabilité » le cinquième pilier de la stratégie quinquennale de notre organisation pour le développement du football européen – aux côtés du football, de la confiance, de la compétitivité et de la prospérité. Sur la base de ce premier signal, nous avons élaboré, au cours du second semestre 2021, une stratégie de durabilité à long terme à l’horizon 2030, intitulée « L’Union fait la force ». La mission de notre stratégie est claire : inspirer, dynamiser et accélérer l’action collective en faveur du respect des droits humains et de l’environnement dans le contexte du football européen. Et pour aller au-delà de l’intention stratégique, nous avons défini une direction claire, en identifiant un ensemble d’objectifs ambitieux et de cibles claires, de manière ouverte et transparente.

Naturellement, « L’union fait la force » est en accord avec les cadres et les normes reconnus au niveau international, notamment les Objectifs de Développement Durable et le Cadre d’action « Le sport au service de l’action climatique » des Nations Unies, le Pacte vert pour l’Europe, la Déclaration universelle des droits de l’homme et les principes directeurs des Nations Unies relatifs aux entreprises et aux droits de l’homme.

 

Quelle est votre vision du développement durable et comment le football peut-il participer à atteindre ces objectifs ?
MU : Nous sommes guidés par la conviction que la durabilité contribue au succès du football européen. Mais le football ne doit pas simplement intercepter et suivre les tendances de la durabilité et de la société – il doit les anticiper et en être à l’origine. Nous sommes au début d’un parcours à long terme, et ce dernier sera riche en défis. Pour les surmonter, l’écosystème du football européen devra reconnaître l’urgence d’agir et collaborer autour d’objectifs communs.

Tout au long de ce parcours, nous devons nous concentrer sur le football et son influence sur la société, en donnant la priorité aux problématiques pertinentes pour le football européen, en œuvrant avec des partenaires et des institutions partageant nos convictions, sur la base d’une confiance mutuelle, afin de sensibiliser le public aux questions qui comptent et en nous appuyant sur la solidarité qui caractérise notre communauté depuis tant d’années.

Notre stratégie repose sur 11 politiques, couvrant les droits humains et l’environnement, reconnaissant que la durabilité exige un juste équilibre entre des actions et des pratiques socialement responsables et respectueuses de l’environnement afin de préserver la viabilité à long terme du football. Chacune des politiques est étayée par une ambition pour 2030, des objectifs et des indicateurs-clés de performance, et sera mise en œuvre dans cinq domaines d’action : l’organisation interne de l’UEFA, les événements de l’UEFA, les membres de l’UEFA, l’écosystème du football, et les partenaires et la société, qui comprend des groupes tels que les sponsors, les supporteurs et les institutions mondiales.

« Un système de gestion durable des événements déployé lors de l’Euro 2024 »

Parmi vos 11 engagements, quatre de vos engagements concernent les aspects environnementaux. C’est le cas notamment des événements durables. Comment pouvez-vous agir pour réduire l’impact environnemental des compétitions organisées par l’UEFA ? Comment viser selon vous des événements sportifs à zéro impact ?

MU : Notre ambition est d’intégrer les principes, pratiques et standards de durabilité dans le cycle de vie des événements liés au football.

Par exemple, en ce qui concerne les émissions de gaz à effet de serre, nous nous efforçons de les réduire afin d’atteindre notre objectif de réduction des émissions de 50% d’ici à 2030, en vue de parvenir à un bilan carbone net nul d’ici à 2040 au sein de l’UEFA, lors des événements de cette dernière et, collectivement, dans le football européen. Mais nous savons que ces émissions ne peuvent pas être totalement éradiquées, car les clubs et les supporteurs ont besoin de se déplacer. Notre stratégie comporte plusieurs dimensions : environnementale, économique, sociale – et des composantes sportives, car les compétitions évoluent au fil des ans, à la demande des clubs, à des fins commerciales. Nous reconnaissons que des arbitrages difficiles doivent être discutés et effectués, mais il est important de garder à l’esprit les différentes dimensions qui guident la prise de décision.

Concrètement, dans le cadre de nos efforts, nous développons un système de gestion durable des événements (SEMS), avec l’ambition d’établir une nouvelle référence pour les événements sportifs à impact zéro. Le SEMS constitue un nouveau système de suivi et d’évaluation des événements sportifs durables pour l’UEFA. Il se concentre sur un large éventail d’indicateurs de performance alignés sur les impératifs de durabilité, offrant la possibilité de lancer des processus d’amélioration continue des événements de l’UEFA, notamment dans les domaines suivants : mobilité, restauration, santé et bien-être, accès, mesure de l’empreinte carbone, approvisionnements durables et gestion des déchets.

Le SEMS conduira également à une coopération et une innovation plus poussée avec les villes hôtes, les partenaires et les autres parties prenantes du football afin de façonner un héritage durable pour les événements. Nous déploierons le SEMS à partir de 2023, la première mise en œuvre complète ayant lieu lors de l’UEFA EURO 2024 en Allemagne. En ce qui concerne ce dernier point, notre stratégie de responsabilité sociale des événements a été présentée en avril 2021, définissant certains domaines prioritaires, notamment autour de l’agenda environnemental. Tout comme la stratégie de durabilité de l’UEFA, il ne s’agit pas d’un but en soi mais bien d’un point de départ pour devenir des catalyseurs et des accélérateurs du changement.

 

L’UEFA est engagée dans le projet « Life Tackle » aux côtés de l’UE. Quels sont les objectifs de ce projet ? Quelles complémentarités voyez-vous à un tel partenariat conduit avec les institutions européennes ?
MU : Le but de « LIFE Tackle » est d’améliorer la gestion environnementale des matchs de football et de rehausser le niveau général de conscience écologique dans le secteur du football. Les objectifs concrets du projet sont d’accroître la sensibilisation à la gestion environnementale dans les stades de football afin de réduire les déchets générés lors des événements footballistiques, et de s’attaquer à d’autres problèmes environnementaux liés à ces événements, notamment la consommation d’énergie et le transport. Trois associations nationales de football ont été impliquées en tant que partenaires à part entière dans le projet : les fédérations italienne, roumaine et suédoise. « LIFE Tackle » a été l’un des projets les plus importants au niveau européen pour l’UEFA, au niveau de l’impact et du budget (budget global : 1,94 million d’euros). Nous sommes heureux que les lignes directrices du projet visant à améliorer la gestion environnementale dans les stades et les outils de sensibilisation développés aient été mis en œuvre dans 12 stades européens.

Plus généralement, l’UEFA a développé des liens étroits avec l’UE et le Conseil de l’Europe. Nous les considérons comme des partenaires naturels et nous nous engageons avec eux dans un dialogue permanent, en participant à des groupes de travail et à des événements pour faire avancer l’agenda des droits humains et de l’environnement. Dans ce contexte, nous nous associons par exemple à la Commission européenne dans le cadre d’une campagne commune sur le climat, en prônant que « chaque geste compte », que chaque supporteur peut faire un petit geste pour réduire son impact sur l’environnement. De petites actions concrètes qui, multipliées par des millions, sont efficaces. C’est ce que nous pouvons catalyser à travers cette campagne

Hormis les engagements environnementaux, votre stratégie vise 7 objectifs sociaux majeurs, parmi lesquels la lutte contre le racisme, la protection des jeunes, la santé, l’égalité, l’inclusion ou encore la solidarité. Que fait l’UEFA de marquant en la matière et quels objectifs vous fixez-vous à horizon 2030 ?

MU : Le football a pour vocation de rassembler les gens – des personnes d’âges, de milieux, de nationalités et de capacités différents qui partagent une passion commune. Nos politiques en matière de droits humains visent à instaurer une culture d’inclusion qui s’étend à l’ensemble du football, du jeu lui-même à toutes les activités qui y sont liées. Personne ne doit être victime de discrimination ou d’exclusion en raison de ses caractéristiques personnelles, qu’il s’agisse de jouer, d’entraîner, d’arbitrer ou d’organiser. Nous aspirons également à ce que le football soit un vecteur de promotion des droits humains au-delà du terrain, en engageant la société et les gouvernements sur des sujets clés, en éduquant et en sensibilisant.

Notre objectif principal est toujours de protéger notre jeu. Prenons l’exemple concret des abus en ligne, un phénomène récent, pour lequel nous voulons donner aux joueurs, entraîneurs, arbitres et officiels la possibilité d’être protégés par l’UEFA. À cette fin, au début de l’UEFA EURO féminin de cette année, l’UEFA a lancé une plateforme dédiée aux abus en ligne dans le but de surveiller, de signaler et de solutionner les problèmes rencontrés. Cette plateforme combine analyse automatique et intervention humaine. Il s’agit d’un investissement de trois ans de la part de l’UEFA, dans lequel nous travaillons en étroite collaboration avec les principales plateformes de réseaux sociaux telles que Twitter, Meta [Instagram et Facebook] et TikTok. En outre, nous nous engageons de manière proactive avec les équipes participantes, en les informant avant le tournoi et après chaque match.

En complément de cette plateforme, nous avons deux piliers supplémentaires dans le cadre de notre nouveau programme Respect : une campagne « Real Scars », qui met en lumière les effets dévastateurs des abus en ligne dirigés contre les joueurs de football, les entraîneurs, les arbitres et les officiels et les éduque sur la meilleure façon de se défendre contre ce type d’abus. Enfin, une nouvelle série documentaire appelée « Outraged », qui traite de la discrimination et des abus, disponible sur UEFA.tv. L’un des cinq volets de la série porte sur les abus en ligne. Des stars du football comme Wendie Renard, Jorginho, Alisha Lehmann, Karen Carney, Kai Havertz et Patrick Vieira partagent leurs expériences et leurs avis sur le sujet.

Dans l’exemple ci-dessus et dans les nombreuses autres activités que nous entreprenons, nous voulons rallier toutes les parties prenantes de notre écosystème afin d’obtenir des résultats tangibles. Car nous savons que nous ne pouvons agir seuls. Il s’agit d’un investissement à long terme dans lequel, si nous travaillons ensemble et montrons l’exemple, nous pourrons atteindre des objectifs ambitieux, et jouer notre rôle en rendant le football européen encore plus attrayant et fructueux.

 

Début juillet, les Nations Unies ont annoncé le lancement de « Football for the Goals », une plateforme pour s’engager et plaider en faveur des ODD. Comment l’UEFA s’engage-t-elle dans cette initiative ?
MU : L’UEFA est ravie d’être le membre inaugural de cette initiative inspirante, qui a été lancée le premier jour de l’UEFA EURO féminin 2022. À cette occasion, la vice-secrétaire générale des Nations unies, Amina J. Mohammed, et le président de l’UEFA, Aleksander Čeferin, ont souligné le pouvoir du football et l’empreinte mondiale de ce sport pour faire progresser la durabilité, l’égalité, les droits de l’homme et l’action climatique.

Les politiques et les objectifs de l’UEFA en matière de développement durable sont fermement ancrés en tant que contribution au programme « Football for the Goals ». Nous invitons les parties prenantes du football – confédérations, associations nationales, ligues et clubs, joueurs, associations de joueurs, supporteurs, médias et partenaires commerciaux – à rejoindre cette initiative et à devenir des agents actifs du changement. Grâce à leurs engagements et à nos actions collectives, nous sensibiliserons le public aux ODD et montrerons comment les pratiques durables peuvent être intégrées dans tout modèle économique, y compris le sport.

 

Propos recueillis par Sylvain Landa


Retrouvez l’ensemble des articles dans notre revue spéciale n°53
« Sport et Objectifs de Developpement Durable »

Revue Sport et Citoyenneté 53



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