« Les jeux et sports traditionnels font partie de notre patrimoine culturel immatériel »

 

Ernesto Renato Ottone Ramírez par © UNESCO_Christelle ALIX

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Ancien ministre de la Culture du gouvernement de Michelle Bachelet, le Chilien Ernesto Renato Ottone Ramírez assure depuis 2018 la fonction de Sous-Directeur général pour la culture à l’UNESCO. Sport et Citoyenneté l’a interrogé sur les liens entre le sport et la culture, à l’occasion de cette revue spéciale.

 

L’UNESCO est la seule agence des Nations unies à avoir un mandat spécifique pour la culture. Face aux défis actuels, quel rôle la culture joue-t-elle dans le monde ?

Depuis sa création, l’UNESCO a placé la culture au cœur de son mandat, reconnaissant le rôle de la culture dans la construction de la paix, la célébration de la diversité et le développement centré sur l’Homme. Nous promouvons une approche de la culture fondée sur les droits et ancrée dans la promotion de la diversité culturelle et linguistique dans l’ensemble du domaine culturel. En tant qu’incarnation de la mémoire collective des communautés, le patrimoine vivant et évolutif – y compris la musique, la danse, les rituels et les jeux et sports traditionnels – renforce le sentiment d’identité et d’appartenance, ainsi que la résilience et la capacité à se projeter dans l’avenir. Ces dernières années, la culture a été progressivement intégrée à l’agenda international. Sa contribution au développement durable et à la défense de la dignité humaine est de plus en plus reconnue, notamment par le biais de la cohésion sociale et de l’innovation. En septembre 2022, 150 ministres de la culture se sont réunis à Mexico pour la conférence de l’UNESCO sur les politiques culturelles et ont adopté la déclaration MONDIACULT, qui a fait date. Ces textes historiques reconnaissent, pour la première fois, la culture comme bien public mondial.
La culture a également un impact socio-économique positif. Selon les données de l’UNESCO, les industries culturelles et créatives emploient plus de jeunes que n’importe quel autre secteur, représentent environ 6% de tous les emplois existants dans le monde et génèrent environ 3% du PIB mondial, ce qui fait de ces industries une source importante de revenus et d’opportunités. Selon la vision de MONDIACULT, la culture peut contribuer davantage à la réduction des inégalités, notamment pour les femmes, les jeunes, les enfants, les peuples autochtones et les personnes en situation de handicap.

« La culture a été reconnue comme un bien public mondial »

À la suite de conflits et de situations d’urgence, il est essentiel de faire revivre le patrimoine et la vie culturelle pour reconstruire les communautés et promouvoir la réconciliation. Depuis des décennies, l’UNESCO soutient la restauration du patrimoine culturel à la suite de conflits et de situations d’urgence, de la Bosnie-Herzégovine à Tombouctou (Mali), en Irak, en passant par Beyrouth (Liban), l’Afghanistan et aujourd’hui l’Ukraine. En fait, à une époque de grands changements, la culture est plus importante que jamais. Elle a longtemps été un moteur de transformation sociale, nous aidant à trouver des solutions aux défis mondiaux. Aujourd’hui, nous avons besoin de la culture pour rendre les communautés résilientes et leur donner espoir en l’avenir.

 

Photo chateauLes jeux et sports traditionnels constituent un lien entre le sport et la culture. Comment l’UNESCO participe-t-elle à leur promotion ?

De nombreux jeux et sports traditionnels sont pratiqués à travers le monde, incarnant diverses expressions de la culture. En vertu de la Convention de 2003 de l’UNESCO pour la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel, les jeux et sports traditionnels peuvent être considérés comme faisant partie intégrante du patrimoine vivant de l’Humanité, à condition qu’ils répondent aux définitions données dans le texte.
Voici quelques exemples de jeux et sports traditionnels inscrits sur les listes de la Convention de 2003 de l’UNESCO :

  • Cultiver la ludodiversité : sauvegarder les jeux traditionnels en Flandre (Belgique ; Registre des bonnes pratiques de sauvegarde, inscrit en 2011)
  • Chovqan, un jeu traditionnel de montée de chevaux (Azerbaïdjan ; Liste de sauvegarde urgente, inscrite en 2013)
  • Kirkpinar, un festival de lutte à l’huile (Turquie, Liste représentative, inscrite en 2015)
  • Hurling (Irlande, Liste représentative, inscrite en 2018).
  • Lutte traditionnelle coréenne (Ssirum/Ssireum) (République populaire démocratique de Corée et République de Corée, Liste représentative, inscrite en 2018).

Ces jeux et sports traditionnels sont principalement pratiqués en groupe au sein d’une communauté, ce qui crée un sentiment d’identité et de cohésion. Ils peuvent également renforcer la tolérance et la compréhension entre les membres de la communauté.
Avec les processus de mondialisation et de transformation sociale en cours, ces pratiques subissent également des changements et, dans certains cas, disparaissent. Les enfants et les jeunes ont moins d’occasions de participer aux jeux et aux sports traditionnels, ce qui complique la transmission entre les générations. La préservation des jeux et sports traditionnels dépasse la seule question de l’activité physique.Il s’agit de la pérennité de notre humanité commune dans toute sa diversité et sa vitalité.


Revue 55 Sport et CitoyennetéLire la revue :

Sport et Citoyenneté n°55 : Promouvoir le sport et l’activité physique par la culture 

 





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