Le sport : un champ éducatif en jachère

16 juin 2010

Arvin Berod_Alain

 

Alain Arvin-Bérod

Membre du comité scientifique, Sport et Citoyenneté

Philosophe

 

 

La crise européenne et mondiale dessine un nouveau rapport entre la démocratie et la politique. Le sport doit prendre sa place dans ce renouveau du politique.

La réalité d’un sport présenté comme un champ éducatif et social en jachère doit être prise au sérieux pour deux raisons au moins. En premier parce que le sport en France atteste d’un déficit de ses missions éducatives et sociales dans l’accès aux pratiques comme dans le haut niveau, et ensuite parce qu’il reste synonyme d’un soi-disant « terreau » naturel de valeurs éducatives et citoyennes susceptibles de sortir le pays indemne de la crise sociale et économique… Il serait ainsi un champ aux ressources physiques et morales inépuisables, un sport de type « créationniste » qui aurait à la fois la vertu pacificatrice des jeux antiques nimbés d’une pureté originelle (?) et la vertu éducatrice qu’il suffirait de « creuser, de fouiller et de bêcher » selon le précepte de La Fontaine pour en fertiliser l’humus.

Or les évolutions positives et protéiformes de la pratique sportive (compétitif, préventif, alternatif) comme ses dérives (dopage, trafics) indiquent au contraire à quel point « le » sport n’a pas une autonomie innée vis-à-vis des forces sociales et de l’environnement mondial. Le sport est plus que « du » sport : dans son organisation (management et financement) comme dans sa relation à l’imaginaire collectif où il n’est pas la statue figée de stars médiatisées ni l’addition de pratiques physiques associatives et individuelles. L’exigence d’un sport sain dans une société saine, d’un sport éducatif social et citoyen est devenu l’horizon de la société et pas exclusivement celui des sportifs.

Aujourd’hui un nouvel essor doit être donné au sport.

Comment ? Au travers d’un contrat social englobant les enjeux écologiques et prenant appui sur la règle de l’équité et du respect des valeurs républicaines, ceci dans le cadre d’une gouvernance partagée entre ses quatre acteurs : le mouvement sportif, l’Etat, les collectivités territoriales et le secteur économique.

Il faut construire ensemble le « contrat du plus sport » en visant le plus proche, le plus juste et le plus longtemps. Cette inflexion vers une forme de « contrat social » s’est manifestée par quelques signes forts au niveau européen avec la présence du sport dans le Traité de Lisbonne (article 165) ainsi que dans le recadrage des priorités de la C.E en faveur de sa spécificité et du sport de masse. Cette évolution indique un nouveau degré de maturité dans la construction européenne, thème peu prisé en France, hexagone sportif arc-bouté sur un modèle daté qui lui a fait ignorer en 2006 une évolution notable avec les « Jeux olympiques de la Jeunesse » pour lesquels aucune ville n’a posé sa candidature alors qu’il s’agit de jeux nouveaux à caractère éducatif et sanitaire (la lutte contre la malnutrition et l’obésité) dont les premières éditions se dérouleront en Asie ( été 2010 à Singapour) et en Europe ( hiver 2012 à Innsbruck). Il faut cultiver le contrat social pour faire partager les valeurs éducatives et sociales du sport.





Sport et citoyenneté