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Sport et Santé mentale :
toujours plus vite, plus haut, plus fort ?

Sylvain Landa, Directeur exécutif, Think tank Sport et Citoyenneté

Sportive qui écrit sur un tableau à côté de son coach

 

En France, une personne sur cinq est touchée chaque année par un trouble psychique, soit 13 millions de Français. A l’occasion de la journée mondiale de la santé mentale, célébrée chaque année le 10 octobre et qui offre une fenêtre de sensibilisation sur la nécessité d’œuvrer en faveur du bien-être émotionnel, voyons si et comment le sport contribue à ces questions.

 

L’onde de choc avait fait le tour du monde. A Tokyo, lors des derniers Jeux olympiques d’été, l’icône Simone Biles, gymnaste la plus médaillée de l’Histoire, annonçait se retirer de la compétition pour préserver sa santé mentale. Une semaine plus tard, après avoir pris la décision de se présenter au concours de la poutre, elle remportait une nouvelle médaille de bronze et prononçait un discours fort à destination des autres sportifs, appelant « à en parler beaucoup plus, surtout avec les athlètes ». Une forme de libération de la parole dans le sport de très haute performance. Un domaine où le doute et l’aveu de certaines faiblesses sont rarement les bienvenus. Depuis, les prises de parole se sont multipliées. Nombreux sont les sportives et sportifs qui prennent du recul ou qui avouent se faire accompagner sur le plan psychologique. Pour performer davantage, mais aussi pour se ressourcer et prendre soin d’eux.

 

La santé mentale, un sujet mieux connu

La santé mentale a longtemps souffert d’une mauvaise appréhension. L’Organisation mondiale de la santé (OMS) rappelle pourtant qu’elle est une composante essentielle de la santé, et qu’elle représente bien plus que l’absence de troubles ou de handicaps mentaux. La santé mentale est en effet un « état de bien-être qui permet à chacun de réaliser son potentiel, de faire face aux difficultés normales de la vie, de travailler avec succès et de manière productive, et d’être en mesure d’apporter une contribution à la communauté ». Santé Publique France rappelle que la santé mentale recouvre trois dimensions :

  • La santé mentale positive, qui recouvre les sentiments de bien-être, d’épanouissement personnel ainsi que les ressources psychologiques et les capacités d’agir de l’individu dans ses rôles sociaux.
  • La détresse psychologique réactionnelle, qui est le plus souvent induite par des situations éprouvantes et des difficultés existentielles (deuil, échec relationnel, scolaire, contre-performance…) et qui n’est pas forcément révélatrice d’un trouble mental. Les symptômes ici sont relativement communs et le plus souvent anxieux ou dépressifs, peuvent apparaître dans un contexte d’accidents de la vie ou d’événements stressants et peuvent être transitoires. Dans la majorité des cas, les personnes en détresse psychologique ne nécessitent pas de soins spécialisés. Toutefois, mal repérée ou mal accompagnée, la détresse psychologique peut faire basculer la personne dans une maladie ou multiplier les difficultés sociales.
  • Les troubles psychiatriques de durée variable, plus ou moins sévères et/ou handicapants, qui se réfèrent à des classifications précises et qui relèvent d’une prise en charge médicale.

 

Le sport de haut niveau face à la santé mentale

Les sportives et sportifs de haut niveau, parce qu’ils sont continuellement jaugés à l’aune de leurs performances, parce qu’ils font l’objet d’attentes majeures, du grand public mais aussi des pouvoirs publics, a fortiori à l’approche des grandes compétitions internationales, parce qu’ils sont exposés médiatiquement et sur les réseaux sociaux, sont particulièrement sujets à des détresses psychologiques réactionnelles. Sans compter les épreuves de vie qu’ils ou elles peuvent traverser, au même titre que chacun. L’équilibre entre la vie professionnelle et la vie personnelle est d’autant plus compliqué à trouver pour ces athlètes que les deux s’entremêlent, et qu’il est difficile pour eux de « couper ». Au même titre qu’un plan d’entraînement ou qu’un suivi médical individualisé, un accompagnement sur le plan mental constitue aujourd’hui une offre indispensable pour les structures en charge du suivi des sportifs de haut niveau. C’est le cas par exemple des maisons régionales de la performance (MRP), mises en place dans le cadre de la nouvelle gouvernance du sport et implantées aujourd’hui dans les 17 régions, avec un pilotage étroit effectué par l’Agence nationale du Sport. Ces dernières accompagnent notamment les « médaillés probables », ceux ayant déjà connu un podium olympique ou qui aspirent à connaître ces hauteurs dans quelques mois à Paris. Des podiums qui se jouent parfois à quelques millimètres ou à quelques centièmes de seconde, et qui justifient d’essayer d’optimiser au maximum tous les leviers de la performance, y compris sur le plan mental. En Pays de la Loire, un réseau régional des intervenants en psychologie et performance mentale a par exemple été constitué sous l’égide de la MRP et du CREPS des Pays de la Loire, dans l’optique de faciliter la démarche du sportif ou de la sportive, mais aussi de la sécuriser, en garantissant un cadre éthique partagé.

 

Les activités physiques et sportives dans le parcours de soin

personnes qui méditentSi elles peuvent générer du stress, de la détresse et aboutir à des troubles psychiatriques plus sévères, les activités physiques ou sportives peuvent aussi être une réponse aux épreuves traversées. Une étude du British Journal of Sports Medicine concluait il y a quelques mois que l’activité physique ou sportive serait 1,5 fois plus efficace que la médication pour lutter contre les symptômes de détresse psychologique. Un positionnement que revendique la maison sport-santé PEPS située en région parisienne. Spécialisée en santé mentale, elle s’adresse à toutes les personnes présentant un trouble en santé mentale qui souhaiteraient bénéficier d’une activité physique adaptée pour accéder à un mieux-être psychique et physique. Cela peut concerner les affections de longue durée (schizophrénie, trouble bipolaire, dépression chronique) comme des affections plus ponctuelles (dépression, légère, burn out…). Les activités physiques proposées sont alors adaptées aux compétences physiques mais aussi aux motivations et aux limitations psychologiques de chacun.

 

Renforcer le plaidoyer et faire connaître les bonnes pratiques

Il y a quelques années, notre Think tank a participé au développement du projet européen INALHM, piloté par le European Network of Active Living and Mental Health et plusieurs partenaires académiques, sportifs et institutionnels. L’objectif était de mieux connaître ce phénomène et de contribuer à l’élaboration de lignes directrices en la matière. Une bibliothèque interactive permet d’identifier des bonnes pratiques mises en œuvre en Europe ainsi que des ressources académiques.

Toujours sur le volet européen, l’INSEP collabore depuis quelques semaines avec cinq autres pays européens dans le cadre d’un projet appelé « MENTiS », qui vise à favoriser la santé mentale des sportifs de haut niveau à travers l’entourage. L’objectif est de faciliter l’identification d’éventuels signes de détresse psychologique, afin de pouvoir intervenir aux côtés du sportif le plus rapidement possible. Deux exemples qui démontrent combien le sujet a pris de l’importance depuis les déclarations de Simone Biles.


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