catégories:

Un bénévolat français impacté par la crise covid, qui entrevoit un futur prometteur

par Simon Laville

Après deux années de crise aux effets multiples, l’organisme Recherches & Solidarités a publié, en mai 2022, une enquête intitulée « La France bénévole : Évolutions et perspectives ». Si cette enquête ne fait pas explicitement mention du secteur sportif, l’objectif est d’observer et analyser les conséquences de cette crise sur le paysage bénévole français et tenter de définir les tendances futures.

 

Cette enquête est construite avec une double approche : une enquête réalisée par l’IFOP auprès des Français pour suivre les évolutions du nombre de bénévoles et des formes d’engagement et une enquête spécifique organisée par Recherches & Solidarités auprès des bénévoles afin d’interpréter les évolutions, tenter de les anticiper, accompagner les associations.

En 2022, en moyenne, 36% des Français donnent de leur temps (en baisse par rapport à 2019, 39%), 35% parmi les hommes et 37% parmi les femmes. Au niveau générationnel, on observe un repli dans trois des quatre catégories d’âges (moins de 35 ans ; 50-65 ans ; Plus de 65 ans), avec une hausse chez les 35-49 ans. Enfin, si nous nous intéressons au niveau de diplômes de ces français, une corrélation se vérifie au fil des années, entre la formation reçue et la propension à donner du temps. Un phénomène nommé fracture associative, où les bénévoles disposant d’une formation plus modeste sont moins nombreux que les plus diplômés.

L’organisme Recherches & Solidarités distinguent trois catégories de bénévolats. En 2022, on observe une forte diminution des Français appartenant à la première catégorie (les personnes qui donnent du temps dans une association) : ils sont 20% en 2022. La deuxième catégorie est aussi en baisse (les personnes bénévoles au sein d’une autre organisation). Enfin, la dernière catégorie de bénévoles que l’on appelle le bénévolat direct et qui regroupe les personnes qui donnent du temps auprès d’une ou plusieurs personnes hors cadre familial, est quant à elle en hausse, et attire davantage les femmes et les moins de 35 ans.

Focus sur les bénévoles qui donnent du temps dans une association

Les personnes qui donnent du temps dans une association représentent 20% des Français en 2022, 22% parmi les hommes et 18% parmi les femmes. Une tendance à la baisse depuis 2016, qui s’est accentuée entre 2019 et 2022 (24% en 2019 contre 20% en 2022). On a donc un secteur associatif qui a perdu environ 15% de ses bénévoles. On observe un repli plus significatif chez les femmes que chez les hommes. Au niveau générationnel, on observe un repli dans chacune des classes d’âge, avec un repli moins important chez les jeunes (- de 35 ans) et à l’inverse un repli plus prononcé chez les 65 ans et plus.

La fracture associative mentionnée précédemment est bien présente chez les bénévoles donnant de leur temps dans une association. On observe ainsi une variation de la proportion de bénévoles allant de 15 à 27% selon le niveau de diplômes des intéressés. Cette fracture associative n’est pas nouvelle, et était déjà bien présente en 2016 et 2019. Dès lors, la proportion de Français bénévoles dans une association ayant un niveau bac et un niveau CAP, BEP, diminue progressivement depuis 2016. Respectivement 26% en 2016, 21% en 2019 et 17% aujourd’hui pour les détenteurs d’un niveau bac, et 19% en 2016, 17% en 2019 et 15% aujourd’hui pour les bénévoles avec un niveau CAP, BEP.

À l’inverse, la proportion de Français bénévoles dans une association ayant un diplôme supérieur et une formation Bac plus 2 ans, n’a pas diminué entre 2016 et 2019 et a même augmenté pour les Français détenant un Bac plus 2 ans (28% en 2016, 29% en 2019). Le nombre a tout de même diminué entre 2019 et 2022 pour ces deux catégories du fait de la crise covid.

Or, il a été étudié que lorsque les bénévoles titulaires des formations les plus modestes, franchissent le pas d’une association, ils sont plus enclins à lui consacrer du temps par la suite. L’enjeu est donc fort de parvenir enfin à réduire cette fracture : sur le plan individuel pour l’épanouissement et les satisfactions que chacun peut trouver dans le bénévolat, et au niveau des associations qui ont plus que jamais besoin de renforcer leurs équipes. Avec d’immanquables retombées à espérer pour la société́ tout entière.

Enfin, vis à vis de la fréquence de l’engagement, on note en 2022 que 7,8% des bénévoles donnent du temps chaque semaine, 6,5% chaque mois et 5,8% ponctuellement. On observe un repli plus net pour les bénévoles les plus engagés (en 2010 presque 13% des bénévoles donnaient du temps chaque semaine, soit un nombre presque multiplié par deux par rapport à 2022). Les bénévoles les plus engagés sont la colonne vertébrale des associations françaises, ce repli marqué représente donc une menace pour les associations françaises.

Ces différentes données, nous permettent de dresser un panorama plus global. Ainsi, on observe en France, en 2022, une nouvelle composition du groupe de bénévoles au sein des associations, avec un bénévolat plus masculin (55% hommes – 45% femmes) et plus ponctuel (56% de bénévoles ponctuels en 2019 contre 63% en 2022).

 

Les perspectives de demain ?

Ces deux études nous permettent de réfléchir aux perspectives de demain. Deux tendances se dessinent, à savoir, un repli en 2022 momentané et des perspectives encourageantes pour le futur.

Le progressif retour à la normale observé après une succession forcée de mises à l’arrêt et une crise qui a touché la quasi-totalité des catégories de la population, sont autant d’éléments qui témoignent du caractère exceptionnel de la situation. De plus, malgré la crise, on observe une hausse du bénévolat hors organisation. Une démarche à considérer comme un signe fort de solidarité et de citoyenneté, qui témoigne de volontés d’engagements toujours présentes. Ce sont aussi de nouveau bénévoles à fidéliser.

La seconde étude réalisée par Recherches & Solidarités, permet de dresser un profil plus précis du bénévole français. Malgré les difficultés rencontrées avec la crise, 80% des bénévoles se déclarent satisfaits. Ce sont aussi des bénévoles prêts à s’engager, à prendre des responsabilités, plutôt que l’inverse. On observe aussi une volonté d’engagement marqué chez les jeunes ainsi qu’une importance accordée aux savoir-faire et aux compétences acquises en association.

Enfin, le numérique prend une place grandissante dans le milieu associatif, il maintient le lien entre les différents acteurs et offre notamment des activités de substitution. Aujourd’hui 60% des bénévoles agissent à distance et utilisent le télé-bénévolat (40% de manière régulière), une pratique qui s’est accentuée avec la crise du covid, et qui facilite l’action des personnes peu disponibles ou peu mobiles.





Sport et citoyenneté