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Un médiateur socio-sportif dans les clubs de football amateurs pour favoriser l’inclusion des jeunes MENA

Sophie Lopez, chargée de projets affaires européennes,Think tank Sport et Citoyenneté

 

Alors que les mineurs étrangers non-accompagnés (MENA) représenteraient plus de 23 300 des demandeurs d’asile en Union européenne en 2020, le football se révèle être un tremplin idéal pour stimuler leur inclusion sociale. La mise en place d’une médiation socio-sportive peut être une solution aux nombreuses barrières rencontrées par les clubs qui souhaitent se lancer.

 

 

Depuis 2015, la crise de l’accueil des populations réfugiées continue à s’enliser dans l’Union européenne. Les mineurs étrangers non-accompagnés (MENA) représentaient 23 330 des demandeurs d’asile dans l’Union européenne en 2020[1]. Perte de repère et des liens familiaux, souffrance sur le chemin de l’exil et à l’arrivée dans le pays hôte… Ces MENA constituent un public encore plus vulnérable. La Communication de la Commission européenne de 2017 sur La protection des enfants dans le cadre des migrations prévoit que les conditions d’accueil doivent inclure tous les services de soutien nécessaires pour garantir l’intérêt supérieur et le bien-être de l’enfant. Ceci inclut des mesures liées à l’intégration[2].

Dans cette optique, le football, sport le plus populaire au monde, a un rôle à jouer. Certes, ce n’est pas la seule solution pour répondre à ce défi immense, mais il peut être un tremplin idéal pour stimuler l’inclusion sociale. Pour les MENA, rejoindre une équipe locale est un moyen d’entrer en contact avec de nouvelles personnes, de se faire de « nouveaux amis », d’apprendre de manière latente la langue locale et les codes sociaux de la communauté d’accueil.

Les bénéfices de cette inclusion sont multiples, aussi bien pour les MENA que pour leur communauté d’accueil. Pourtant, des barrières à l’inclusion des MENA dans et par le football sont encore présentes. Des solutions peuvent cependant être mises en place, via notamment la présence d’un médiateur socio-sportif. La dernière conférence nationale de notre projet FIRE+ en Belgique nous a permis de revenir sur ces sujets.

Au-delà du bien-être, il y a aussi la question de l’appartenance

Lors de leur arrivée dans le pays hôte, les jeunes MENA sont immédiatement dans une logique de survie, comme l’a rappelé Christine Roisin, coordinatrice MENA au sein de l’association (asbl) SOS Jeunes active en Belgique sur ces sujets. Une fois que le jeune est mis à l’abri, la question de l’inclusion peut se poser, et pourquoi pas en partant du football. Rejoindre une équipe signifie être mis dans un cadre avec des règles et des obligations. Ceci impose implicitement au jeune de trouver de nouveaux repères et de s’accrocher à une nouvelle routine de vie saine. Au-delà du bien-être, il y a aussi la question de l’appartenance : rejoindre une équipe de football avec des jeunes de son âge permet à un MENA de s’associer à un groupe et de se sentir valorisé, aussi bien à ses yeux qu’aux yeux des autres.

Nous faisons face à des lourdeurs administratives

Les barrières administratives sont encore une problématique mise sur la table. Au-delà des barrières « classiques » liées au traitement de la demande d’asile, d’autres problèmes se posent : qui va payer la cotisation µ ? Les équipements ? L’assurance ? Le sport n’est pas encore perçu comme un élément essentiel au processus d’inclusion sociale par les pouvoirs publics, qui rechignent à dégager des moyens financiers pour accompagner les jeunes MENA dans leurs activités sportives. De plus, les assistants sociaux manquent d’informations sur les possibilités offertes par les structrures sportives. Pourtant, le droit d’accéder librement au sport est un droit fondamental reconnu comme tel par de nombreux textes, à commencer par la Charte internationale de l’éducation physique, de l’activité physique et du sport de l’Unesco. Il est donc crucial de pouvoir compter sur des référents qui puissent faire le lien entre les centres d’hébergement et les clubs de football.

Un médiateur socio-sportif pour accompagner les clubs à leur échelle

Accueillir un jeune MENA peut être redouté par les bénévoles d’un club de football amateur. Un travail de sensibilisation et d’information est important pour expliquer, par exemple, le processus de demande d’asile, le rôle et la nomination du tuteur et la spécificité du profil du jeune MENA. Comme nous l’a rappelé Mouâd Salhi, Directeur adjoint du centre Fedasil de Mouscron (Belgique)[3], « quand les clubs sont informés et accompagnés, ils sont plus enclins, et même très enthousiastes à l’idée accueillir des jeunes MENA ».

Pour cela, il s’agit de faciliter la mise en relation des centres d’hébergements et de leurs assistants sociaux avec les clubs de football présents à proximité des centres d’accueil. Il est aussi nécessaire de déployer des médiateurs socio-sportifs pour accompagner les clubs dans leurs projets et servir d’interface avec les structures d’accueil.

Ce médiateur socio-sportif peut se trouver directement dans les clubs de football. Pour cela, il est nécessaire de sensibiliser les bénévoles afin de les « former » à la question des jeunes MENA et leur fournir des compétences sociales.

Accompagner le personnel bénévole des clubs de football dans l’accueil des jeunes MENA, c’est toute l’ambition du « FIRE MOOC ». Ce programme de formation en ligne (MOOC), développé dans le cadre du projet européen FIRE et soutenu par le programme Erasmus+ Sport de l’Union européenne, permet à ses utilisateurs d’acquérir des connaissances et de comprendre comment créer leur propre programme d’inclusion. La thématique des jeunes réfugiés et de MENA devenant de plus en plus centrale, un module du MOOC à ce sujet est en cours de développement et sera disponible en 2023.


www.footballwithrefugees.com

[3] Directeur adjoint, centre fedasil de Mouscron.

[1] « Demandeurs d’asile considérés comme mineurs non accompagnés par nationalité, âge et sexe – données annuelles » . eurostat, ec.europa.eu/eurostat/databrowser/view/migr_asyunaa/default/table ? lang=fr.

[2] « Communication from the Commission to the European Parliament. The protection of children in migration ». European Commission, 12 avril 2017, eur-lex.europa.eu/legal-content/EN/TXT/PDF/ ? uri=CELEX : 52017DC0211&from=en.

[3] Directeur adjoint, centre fedasil de Mouscron.



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