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L’héritage social d’un événement :  Du projet à l’action

 

 

 

Michaël Attali, Professeur des universités, Directeur du laboratoire VIPS2 (Violences, Innovations, Politiques, Socialisations et Sports), Université de Rennes 2

 

Héritage : le terme est aujourd’hui inexorablement associé à tout événement sportif, sans que l’on sache véritablement ce qu’il recouvre.

 

Le verbatim du Comité international olympique au sujet de l’héritage est significatif des conceptions en cours dans le mouvement sportif. « Vision », « héritage positif », « bénéfices », « célébration » sont quelques-uns des termes mobilisés dans l’approche stratégique élaborée par cette institution. Ils témoignent des conceptions à l’œuvre au sujet des jeux Olympiques et Paralympiques autant que des évènements nationaux ou internationaux telle que la Coupe du monde de football 2019. Il suffirait de les organiser pour s’assurer d’effets quasi-magiques. La croyance à une spontanéité de l’héritage est tenace, conduisant depuis quelques mois à utiliser cette notion sans en saisir la consistance. Les recherches menées dans plusieurs équipes de recherche internationales, dont le laboratoire de Rennes, soulignent que l’héritage est un processus qui ne s’improvise pas. Il présuppose d’abord un principe de transmission devant conduire à mettre en adéquation l’émetteur et le récepteur. L’évènement doit ainsi se structurer autour d’éléments qui doivent prendre sens pour la diversité des acteurs afin qu’ils puissent s’en saisir et le convertir en actes (relevant de savoir-faire, de savoir-être, etc.). L’homogénéité, qui caractérise la plupart du temps les évènements (unité de temps, d’espace, récurrence des modèles de pratiques, etc.), doit être remplacée par une adaptabilité en fonction des contextes sociaux, des publics visés, des objectifs poursuivis. Il est remarquable de constater qu’aucun évènement n’a permis d’augmenter durablement le nombre de pratiquant-e-s. Tout au plus ont-ils permis la mise en visibilité d’une activité qui, sans dispositif ambitieux d’accompagnement, a peu d’effets. Penser l’héritage implique également de s’inscrire dans la durée. L’improvisation qui caractérise nombre d’actions dans ce domaine permet d’anticiper l’inefficacité. L’héritage doit se structurer deux à trois ans avant l’évènement, se déployer au cours de celui-ci et conduire à un suivi sur une durée de quatre à six années. Commander une enquête d’opinion ou identifier l’intérêt des publics à l’égard d’un évènement ne correspond en rien à une démarche relevant de l’héritage. L’héritage est également multidimensionnel et ne peut s’envisager de manière parcellaire. S’intéresser dans un cas aux représentations, dans un autre aux valeurs supposées ne permet pas de s’inscrire dans cette dynamique. Parce que l’héritage s’inscrit dans la complexité des rapports sociaux pour en devenir un marqueur, le mouvement sportif doit assumer d’en saisir la diversité.

 

« Penser l’héritage et l’inscrire dans la durée »

 

La mobilisation de l’héritage associée à l’ensemble des évènements depuis le début du millénaire s’inscrit dans une logique d’acceptabilité sociale. Force est de constater que si cette mobilisation correspond à une première étape, elle doit rapidement laisser la place aux mises en œuvre. Elles sont déterminées par une véritable structuration de l’héritage qui pour le moment en reste aux mots sans réellement envisager les actes à la hauteur des ambitions déclarées.



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