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Sédentarité : le défi de la nouvelle « addiction à la chaise et aux écrans »

Régis Juanico, député honoraire de la Loire, expert en politique publique sportive

Hakim Khellaf, fondateur du Cluster Grand Paris Sport, ancien conseiller sport à Matignon

      Bureau

 

« En termes de santé publique, la sédentarité, c’est le tabac du 21ème siècle », nous dit Paquito Bernard, professeur au département des Sciences de l’activité physique de l’université Québec à Montréal.

 

La sédentarité, une question de santé ?

La lutte contre la sédentarité et l’inactivité physique nécessitent une prise de conscience des pouvoirs publics, comme ce fut le cas pour le tabac. Nous avons besoin d’un électrochoc, nous ne pourrons pas dire que nous ne savions pas…

Pour l’Observatoire national des activités physiques et de la sédentarité (ONAPS), on est sédentaire au-delà de 7 heures passées assis ou allongé en situation d’éveil dans une journée.

Dépression

La sédentarité concerne près de 40% des adultes pour qui les risques sont avérés pour la santé en termes de mortalité générale, de maladies chroniques et cardio-vasculaires, de dépression, d’effets sur la qualité du sommeil, de troubles de l’alimentation… Les femmes sont plus nombreuses à cumuler sédentarité et inactivité physique que les hommes.

 

Et pourtant, nous sommes programmés pour bouger. Le corps humain est conçu pour être en mouvement et dépenser de l’énergie. Nos muscles, nos ligaments, nos os sont faits pour nous permettre de marcher, courir, nager, pédaler…, pas pour rester assis, vissés sur nos chaises ou devant nos écrans.

Le cardiologue et médecin du sport François Carré observe chez les jeunes générations des cas de diabètes avant 14 ans alors que ce type de maladie chronique survient en principe à l’âge adulte, une pression artérielle en hausse tout comme les taux de cholestérol et une augmentation du nombre de cas de diabètes pour les adolescents de 16 à 18 ans de 2% par an.

 

Encore plus inquiétant, la prévalence du surpoids et de l’obésité touche 34% des enfants de deux à sept ans, dont 18% sont en situation d’obésité. En cas d’obésité infantile, le risque d’obésité à l’âge adulte varie entre 50% et 70% : cela veut dire qu’un enfant obèse à six ans a de très fortes probabilités de devoir se battre toute sa vie contre son surpoids, mais aussi de perdre plusieurs années d’espérance de vie en bonne santé.

Les employés de bureau passent en moyenne 75 à 77% de leur temps de travail en position assise. La position assise répétée devant un écran dans la durée peut générer une fatigue oculaire, un mal de dos, des troubles musculo-squelettiques (TMS).

 

Dos

Les TMS représentent la première cause des arrêts de travail et 88% des maladies professionnelles, soit 45 000 personnes concernées chaque année en France. Notre santé mentale est aussi en jeu : la sédentarité favorise la survenue de troubles du sommeil, mais aussi de dépression ou d’anxiété.

 

« Inverser les courbes » : oui, c’est possible !

L’étude « Inverser les courbes » a permis d’évaluer à la fin de l’année 2022 le niveau de capacité physique initiale (respiratoire, cardiovasculaire et musculaire squelettique) de 8 500 collégiens français en classe de sixième.

La bonne nouvelle, c’est qu’un programme d’activité physique et sportive personnalisé sous la forme d’un entraînement de course à pied de type fractionné pendant six semaines avec deux séances de 15 minutes dans le cadre des cours d’EPS classiques permet des progrès spectaculaires de la condition physique initiale des collégiens testés.

Cette étude démontre qu’on peut « inverser les courbes » de capacité physique et donc de capital santé, à condition de généraliser ce programme à tous les collèges de France, de développer les tests de condition physique de l’école à l’EHPAD afin d’ancrer les bonnes habitudes d’activité physique dans les modes de vie dès le plus jeune âge.

 

Au-delà d’une alimentation saine et équilibrée, la lutte contre la sédentarité et la promotion de l’activité physique régulière tout au long de la vie doit devenir un fil rouge en matière de prévention en santé publique.

Toutes les activités hors de nos chaises, aussi légères soient-elles, sont bénéfiques et comptent dans la prévention des maladies chroniques : monter les escaliers plutôt que prendre l’ascenseur, repasser, cuisiner, faire la vaisselle, passer l’aspirateur, ranger, bricoler, marcher d’une pièce à l’autre, promener son chien, jardiner…

 

Lutter contre la sédentarité, c’est aussi penser nos espaces autrement, par la promotion de nouvelles formes de mobilité au cœur de nos territoires, le développement des mobilités actives (marche, vélo…), des campus actifs promoteur de santé, mais aussi des derniers cinq cents mètres ou du dernier kilomètre aux abords des écoles pour favoriser l’activité physique des Français à proximité de chez eux.

Le design actif qui permet l’aménagement des espaces et bâtiments publics : sentiers pédestres, pistes cyclables sécurisées, parcs et aires de jeux, mais aussi cours de récréation et bâti scolaire (il faut bouger en classe !) est un excellent outil -peu onéreux- qu’il faut déployer partout dans les territoires urbains ou ruraux.

 

Enfin, la prescription et les séances d’activité physique adaptée doivent progressivement faire l’objet d’une prise en charge financière par l’Assurance-Maladie en lien avec les complémentaires santé pour être accessible à tous.

 

La dynamique de l’Héritage sportif, territorial, sociétal des Jeux olympiques et paralympiques de Paris se construit avant les Jeux, si l’on veut qu’il ait des effets durables après 2024. Le déploiement d’un plan ambitieux de lutte contre la sédentarité peut -encore- en être un pilier fondamental.

 

Les solutions à retenir :

  • Le design actif pour l’aménagement des espaces et bâtiments publics
  • Un programme d’activité physique et sportive personnalisé, sous la forme d’un entraînement de course à pied de type fractionné pendant six semaines avec deux séances de 15 minutes dans le cadre des cours d’EPS classiques
  • Le développement de tests de condition physique de l’école à l’EHPAD
  • Le développement des mobilités actives (marche, vélo…), des campus actifs promoteur de santé, et des derniers cinq cents mètres ou du dernier kilomètre aux abords des écoles

 

Un mot sur les auteurs :

Bougeons !Découvrez l’ouvrage « Bougeons ! Manifeste pour des modes de vies plus actifs » (Éditions de l’Aube-Fondation Jean-Jaurès), Août 2023

 

 

 

 


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